samedi 27 juin 2009

Le politique au temps des politiques

L'émission radiophonique Le rendez-vous des politiques (Dominique Rousset, tous les samedi 11h sur France Culture) présente, outre son objet de nous faire découvrir le métier de politique à travers un invité hebdomadaire, un intérêt des plus singuliers. En effet, placé en position centrale d'une émission dont le caractère culturel ne peut échapper, ce dernier se trouve confronté à une situation peu habituelle où planent menaces et espoirs d'un jugement du monde culturel.

Il serait bien naïf de croire que ces hommes et femmes, spécialistes de l'intervention publique, ne saisissent pas l'enjeu d'une telle émission et ne cherchent pas à y jouer un rôle conforme à l'image qu'ils souhaitent donner. A ce titre, les passages récents de plusieurs invités témoignent de comportements-types de natures très différentes.

Certes, la plupart tentent de projeter l'image d'une personne de culture dont chaque acte politique témoigne d'une profondeur qu'il faut croire socratique. Grand manipulateur de foules, le politicien s'avère à ce jeu peu convaincant, tel M. Ba qui ne sait pas parler mais aurait beaucoup lu.

D'autres, moins par conscience du danger de l'imposture que par une certaine ignorance de conviction, se comportent comme s'ils participaient à de ces débats scolastiques et véhéments qui égrenent leurs emplois du temps, tel M. Be qui s'est alors cru en campagne sur on ne sait quel plateau de télévision.

Enfin, passées ces déceptions - non quant aux prestations des invités mais vis-à-vis d'une émission remarquable gâchée par quelques insuffisance politique, il arrive d'assister à des moments forts, où la justesse d'une conviction, la singularité d'un parcours et les questions souvent pertinentes des chroniqueurs éclairent d'un jour nouveau un monde politique le plus souvent en proie au plus glacé des discrédits.

lundi 22 juin 2009

Le verdict du plomb

C'est baigné du souvenir plaisant de la défense Lincoln de Michael Connely, roman qui m'occupa un temps durant l'été 2007 et m'enthousiasma bien plus qu'espéré, que j'entrepris il y a quelques semaines la lecture de son inattendue suite, le verdict de plomb, parue très récemment.

Avant d'aborder le récit, une petite explication s'impose. Si la défense Lincoln m'avait tant plu, c'est parce qu'en dépit de sa remarquable absence d'écriture, ce policier à la conception adroite m'avait fait redécouvrir une joie longtemps oubliée, la jubilation de la lecture. Jubilation à être saisi par une intrigue, à dévorer les pages, à ne plus voir le temps passer et à ne seulement regretter que cette histoire ait une fin. Voilà ce que représentait La défense Lincoln. Non le roman d'un style, d'une écriture, d'un talent ou d'une somme d'idées, mais un roman pur et imparfait pleinement dévoué à la cause du plaisir de lire.

Peut être faut-il voir dans ces souvenirs heureux une raison à ma déception. Après 250 pages, le verdict du plomb pèse au dessus de ce livre au titre prémonitoire. L'intrigue peine à démarrer, les personnages manquent de relief, le narrateur se révèle des plus antipatiques et l'écriture jusque là transparente de M. Connelly se met à devenir trouble. Début du chapitre 30 : "Lorsqu'enfin je fus seul dans le bureau, j'enclenchais le processus comme je le fais toujours : avec des feuilles vierges et des crayons pointus".
hez Harlan Coben, on eu put y voir quelque ironie cohennienne (Adrien Deume n'est pas loin). M. Connelly, pour sa part, affecte tout au long de son roman le sérieux consternant de son personnage à qui on ne la fait pas mais dont la condescendance paternaliste (à l'encontre d'un personnage ancien toxico) ou la violence toute libérale ("j'avais décidé de supprimer l'obstacle plutôt que de devoir constamment en faire le tour", affirme-t-il à propos de sa décision de renvoyer une secrétaire trop bouleversée par la mort de son patron pour travailler sans éclater régulièrement en sanglots) dont il fait preuve tout au long du livre finissent par anéantir tout espoir d'une lecture légère et agréable.

dimanche 21 juin 2009

Sylviane Agacinsky, Ruwen Ogien et Nadine Morano - cette dernière de façon plus indirecte puisque simplement citée - ont présenté leurs argumentations respectives sur la gestation pour autrui samedi matin, lors de l'émission hebdomadaire radiophonique de M. Finkielkraut.

Connu pour son libéralisme en matière de moeurs (voir le très instructif La panique morale, en particulier le passage sur la journée de solidarité), Ruwen Ogien prône la non-intervention de l'Etat dans un domaine qui relève du libre choix individuel et ne saurait être encadré sans une sérieuse légitimité à le faire.

Mme Agacinsky soutient la position inverse, au nom d'une éthique humaine qui consisterait justement à encadrer ce qui de l'ordre du possible, au nom du respect même de ce qu'est l'humanité.

Enfin, accordons à la position de Mme Morano la place qu'elle mérite. Voilà.

S'il ne fait pas de doute que l'individualisme de M Ogien - symbolisé par son principe d'éthique minimale - conduit à une position radicale mais de construction presque esthétique, il semble pourtant possible de lui opposer un principe de réalité qui conduit souvent à ce que le droit théorique et le droit pratique ne se recoupent pas. Car si semble acquis que le droit d'une personne à disposer d'elle même, la réalité d'une misère sociale conduisant des personnes à pratiquer la GPA à des fins de subsistance s'impose également.

samedi 20 juin 2009

La défaite du spectateur

A bien y penser, la défaite du sportif présente bien quelques consolations, sinon des exutoires : l'engagement rageur en toute fin d'un match que l'on sait perdu; le souvenir des efforts consentis, certes non récompensés mais qui inscrivent la défaite dans une démarche active, construite et formatrice.

En cela, elle se distingue de la défaite du spectateur, d'autant plus cruelle que ce dernier, pas plus qu'il n'aurait mérité une victoire de l'équipe qu'il soutient, ne mérite en rien la soudaineté triste et inattendue d'une défaite pour laquelle il n'est que bien peu responsable.

La fatalité du score, accentuée par une dramaturgie de renversement émotionnel - un coup de sifflet marque le passage de l'espoir à la désillusion - s'accompagne par ailleurs d'un double sentiment d'impuissance devant l'évènement et d'une injustice sourde. En effet, quand bien même l'équipe supportée se serait montrée moins digne de la victoire que son adversaire, ce qui n'est pas garant de victoire, le supporteur, lui, intervient autant dans la partie qu'un joueur de dés doté de bras pour applaudir et de cordes vocales pour chanter.

Quand on sait par ailleurs le rôle identitaire qu'il projette dans son action supportrice, confirmée ou non par des attaches régionales, le spectateur est bien autant à pleindre que l'équipe qu'il supporte, assumant une défaite certes plus distance mais tout aussi profonde.

vendredi 19 juin 2009

Comment traiter les incommodations

Il se trouve que mon collègue de bureau m'inspire un dégoût certain et partagé que le temps qui passe peine à atténuer. Il est possible de recourir à un nombre impressionnant de qualificatifs pour désigner l'objet de ces indignations : obséquieux, mielleux, péremptoire, maniéré, de mauvais goût, peu cultivé mais omniscient de revendication plus que de fait, appliqué et sot comme un âne discipliné, encore que nul animal n'ai jamais mérité le déshonneur d'une pareille comparaison.

L'étude de la déformation - et réduction - des rapports humains dans le cadre de l'entreprise a suscité de nombreux textes, mais peut-être pas assez encore. Ainsi, le sot appliqué, s'il fait l'objet d'un rejet mérité en société, se trouve à ses aises dans une structure hiérarchisée où tout supérieur n'apprécie rien moins qu'un exécutant docile et servile et se fait rapidement l'économie de ses préoccuper des motivations sous-jacentes tant le confort d'un laquais le satisfait.

En un mot comme en cent, notre sot appliqué fait l'objet d'attentions supérieures et suscite ainsi le dégoût de bien des collègues en fureur contenue.

Voici donc un éventail de solutions destinées à mettre un terme à cette nuisance commune :
- devenir plus obséquieux encore, de façon à provoquer son dégoût et plus encore son départ;
- pirater son téléphone portable pour y installer un lobotomiseur miniature (efficacité non garantie);
- lui suggérer que le PDG adore les jeunes téméraires qui lui envoient des mails d'insulte sur son blackberry;
- lui faire avaler l'une de ses deux mille boîtes de cirage, qui doivent bien se trouver quelque-part;
- lui faire croire que la direction envisage de changer l'organisation de l'entreprise et supprimer tous les postes de chef pour une structure parfaitement plane. Démission assurée;
- l'ignorer. Comme vous n'êtes pas chef et que par conséquent il vous ignore déjà depuis longtemps, c'est bien la moindre des choses !



lundi 11 mai 2009

Nouvelles mythologies (I)

Je souhaiterais travailler sur un thème plus que jamais pertinent, celui de ce que l'on pourrait appeler la mythologie de l'Homme. J'entend par là une analyse des mécanismes sociaux qui tendent à mettre en avant une vision surévaluée voire héroïsée de l'homme contemporain. Celui-ci se trouve ainsi piégé par le reflet déformant qui lui est constamment offert. Le vivre ensemble cède la place à un vivre dans l'illusion de sa singularité, rêverie la plus communément partagée de nos jours. Car c'est bien là le paradoxe : l'obsession de la singularité conduit à un comportement des plus communs, construit pourtant sur le refus de la ressemblance.

Prenons pour commencer l'exemple d'un flacon de parfum. De nos jours, il ne s'agit plus de sentir bon pour soi et pour les autres, mais de sentir meilleur et différemment, de façon à signifier sa singularité ou plus simplement son existence. La publicité flatte depuis plusieurs années cette aspiration de la distinction, mais elle ne saurait à elle seule expliquer le succès de cete image du soi. Il faut croire que la mondialisation et plus particulièrement internet, en rapprochant les hommes, les a conduit à une meilleure appréciation de leur banalité. Qui suis-je, s'il est manifeste que plusieurs milliers de personnes ont à peu de choses près les mêmes goûts et aspirations que ce qui semblait me définir ?

Devant cette inquitétude identitaire, chacun cherche à se distinguer. Les prétentions disproportionnées des jeunes générations ne sont que le reflet de cette angoisse du moi. Il s'agit de se définir par ses aspirations, plus que jamais supérieures à celles des autres. Mais au lieu de conduire à un formidable mouvement de créativité et d'effort globalisé, le poids du commun s'est affaissé sur lui-même. Plus que jamais, on sauve le monde par procuration dans les séries télévisés plutôt que de s'atteler à un véritable et réel travail d'implication politique. Le fossé se creuse entre des aspirations titanesques et une réalité plate où chacun vit devant ses écrans son propre mythe.

lundi 27 avril 2009

Les ânes du bouclier fiscal

La métaphore animalière semble de rigueur pour tous ceux qui justifient le bouclier fiscal par cet argument suprême : "il est juste qu'une personne ne donne pas plus de la moitié de ce qu'elle gagne à l'État".
En effet, outre l'irréductible arbitraire de la fraction employée - pourquoi 1/2 et pas 52/104èmes ? - en quoi le salaire serait-il une mesure du travail effectué ?
Qui mérite de gagner 2 millions d'euros ? Personne, tout simplement. De telles sommes n'étant en rien corrélées avec la qualité des activités associées, le principe redistributif est là pour les corriger.
Par ailleurs, tous ces revenus aberrants proviennent de plus-values dégagées de la somme des activités des salariés de l'entreprise, privés ainsi du fruit de leur travail - en quoi serait-ce plus celui des dirigeants que le leur ? - par le jeu endogamique des conseils d'administration.
Soyons sérieux, si la concurrence fiscale rend ce mécanisme nécessaire, il n'en demeure pas moins profondément choquant. S'il fait y voir une injustice, c'est bien en ce que si peu de personnes gagnent tant d'argent sur le dos de tant d'autres.

dimanche 19 avril 2009

Manipuler Nicolas Sarkozy, faute de mieux

Ainsi donc, M. Zapatero manquerait de raison. Nous devons ce jugement avisé à notre Président, dont les qualités intellectuelles auront sauté aux yeux des lecteurs de philosophie magazine , aux auditeurs du discours de Dakar ou bien encore de celui du 22 janvier sur la Recherche en France.

Il est permis de sourire devant pareilles tentatives de se prévaloir de qualité dont l'homme politique est pourtant si ouvertement et imparablement dépourvu. Car, faut-il le (lui) rappeler, peu de Présidents de la République n'ont autant suscité de soupçons de lacunes intellectuelles, se seront autant attirés les foudres des professions savantes et n'auront jalonés leur mandat de pareilles marques de méprisable vulgarité ignorante.

Pour antant, reconnaissons lui une qualité, notre Président travaille, occupant ainsi de la meilleur façon qu'il puisse le rôle qui est le sien. Dans une période difficile, où manquent femmes et hommes de qualité, il y a fort à croire que M. Sarkozy gardera l'image d'un président de transition sans talent, assurant les nécessités requises en attente des jours et des personnalités d'une autre ampleur.

Gardons nous dès lors de trop moquer se manières et celles d'une cour de bien basse tenue. Il pourrait - sait-on jamais - se rendre compte que ses efforts pour atteidre quelque considération resteront vains, telle une carotte au bout d'un baton destinée à le faire avancer.



mercredi 15 avril 2009

D'arbres et de forêts

Il y a de cela quelques mois, beaucoup était dit sur la paralysie du PS et l'incapacité de son premier secrétaire à susciter l'adhésion. Homme de compromis, du "consensus mou", M. Hollande concentrait toutes les critiques de citoyens excédés par l'absence de gauche.
Force est de constater qu'en dépit de la crise, l'opposition n'est pas parvenue à sortir d'une invisibilité des plus remarquées. Le renouvellement du secrétariat national n'aura que peu apporté, le parti se lançant tout juste dans une démarche d'élaboration de programme par des "laboratoires d'idées". On ne peut que déplorer dans cette lente et poussive mise en œuvre la piètre capacité d'auto-analyse d'un parti en manque d'hommes de qualité.
Ce n'est pas que M. Hollande manque, mais on ne peut s'empêcher de penser qu'il n'était au fond que l'absence d'arbre qui cachait l'absence de forêt.

mardi 14 avril 2009

Politique et complexité

Plusieurs idées en vrac à propos de la complexité en politique:

- Le monde est devenu plus complexe, plus visible mais moins lisible. Aux conditions de classes des siècles précédents (ouvriers et agriculteurs d'un côté, bourgeoisie et aristocratie de l'autre) s'est substitué une société multiforme, disparate, où le sentiment d'appartenance s'est amenuisé et a dû faire face au rapprochement médiatique des pays en développements. La revendication sociale ne va plus de soi, minée par une amélioration objective des conditions de vie (bien que les inégalités objectives se soient accentuées), un délitement social et la pression symbolique des travailleurs pauvres d'Asie et du Sud.

- Le monde ne fait plus rêver. Les grands idéaux du XXe siècle ont cédé la place à une situation préoccupante, qui appelle à la responsabilité des hommes face à diverses menaces globales (conjoncturelles comme l'économie, structurelles comme le réchauffement climatique). Face à ces risques, le monde s'est structuré en un marché, un opposition de puissances ou le pays étranger est moins un colocataire d'un monde qu'un concurrent, qui menace nos emplois, notre souveraineté, notre culture et notre société. Cet imaginaire collectif de l'étranger concurrent est paradoxalement devenu notre premier universel.

- Le rôle du politique s'est donc sérieusement complexifié. Ce qui allait de soi, lutte contre les injustices et espoirs de construire une société meilleure, tient maintenant de la gageure.

- Face à ce constat, deux tendances se sont dégagées : la gauche, paralysée par la nouvelle difficulté de ses orientations, a perdu tout moyen de lutter et rendu copie blanche. La droite, tenante depuis longtemps de la ligne simple, a doublement profité de ce phénomène. D'une part en offrant un discours lisible (car simple) d'une situation pourtant structurellement complexe, ce qui ne peut que rassurer. D'autre part en suivant sa ligne directrice, celle de la simplicité : si le monde change, c'est qu'il doit changer et que nous devons changer. Il va s'agir de réformes "nécessaires", de "pragmatisme" (alibi contemporain de la simplicité) et surtout d'effort tête baissée. Les plafonds du XXIe siècle sont bas.


mardi 7 avril 2009

Souvenirs de méditerranée

Un vieux sac de sport usagé. A l'intérieur, plusieurs paires de palmes de taille 38 à 43, des masques de diverses générations, dont deux cylindriques en caoutchouc noir et vitre en verre, des tubas bleus identifiés par des bandes de sparadrap blanc, des traces de sable et une odeur de mer. C'était il y a longtemps et loin. Le temps des plongées exploratrices, apnées silencieuses à la recherche de coquillages, poissons colorés, poulpes et coraux délicats.

lundi 6 avril 2009

Un vieux ficus malade

C'est un vieux ficus malade, aux feuilles pâles et desséchées, recroquevillées sur elles-mêmes et prêtes à tomber. Droite comme un I, tuteur à l'appui, dans son pot de terreau, la digne plante attend une âme secourable. Il était bien temps de la déplacer.
John Stuart Greengarden III, Ode à mon ficus, 1762

dimanche 5 avril 2009

Valent-ils la peine de notre considération ?

Face à tels actes ou de gestes que nous contestons, souvent nous arrive-t-il de nous emporter, aveuglé par une colère fixe et vengeresse, aggravée par la déception de ne pas parvenir à leur accorder que la faible attention qu'ils méritent.
Pour autant, la réaction a ses intérêts. L'impassibilité cache souvent un manque de discernement, et l'un comme l'autre conduisent aux mêmes effets : passivité et impunité.
Que soit donc heureux et fier celui qui réagit, car il montre par là sa vertu. La sagesse est un long travail dont lui seul a les clés.

samedi 7 février 2009

La bonne foi de M. Darcos

Interrogé ce matin dans le Rendez-vous des politiques sur les critiques dont il faisait l'objet, M. Darcos s'est défendu des accusations d'autoritarisme en se proclamant de bonne foi, et par là même tenu à ne prendre en considération que son avis, qui selon lui ne vaudrait pas moins qu'un autre.

Passé l'amusement d'entendre une dénégation confirmant à ce point l'accusation contre laquelle elle est construite (non je ne suis pas fermé, car je suis de bonne foi donc je fais ce que je veux), il parait par ailleurs raisonnable de lui opposer que la bonne foi, si elle porte vertu de sincérité, n'a pour autant pas la moindre valeur rationnelle dans un débat dialectique.

Quant à la bonne foi, en fut-il question quelques minutes plus tard, quand il confia ne pas voir dans le report de sa réforme un enterrement, mais bien un geste utile à celle-ci et allant dans son sens ?

Quand, sur France Culture, M. Darcos se vante d'une personne contestataire ayant finalement lu le texte et l'ayant trouvé bon, quand il réduit l'opposition à quelques caractériels de mauvaise foi opposées au travail en petits groupes d'élèves, une chose est certaine : il fut peut-être agrégé de lettres, il est depuis longtemps politique.


jeudi 5 février 2009

Exercice 4

Je pris le métro à Duroc et descendis à Gaité.
Ligne 13. Duroc. Gaité. 2 stations.
Le métro me transporta en quelques minutes de Duroc à Gaité.
Monté à Duroc, je descendis deux stations plus loin à Gaité.
Je regarde par le fenêtre à quelle station nous arrivons. Gaité, il serait temps de descendre.
Je pris le métro à Duroc pour deux stations, mais un incident bloqua la rame un bon quart d'heure. Je descendis à Gaité, fou de rage (cette ville rend fou).
Je sortis de la bouche de métro deux stations plus au sud, rue de la Gaité.
Montparnasse. Plus qu'une station et déjà la moitié du trajet. Duroc n'aura pas eu le temps de me manquer.

mercredi 4 février 2009

Exercice 3 - Compter les moutons

Je suis fatigué. Je ressens une fatigue certaine. Bâillements. Quelle fatigue ! Je tombe de sommeil. Morphée me tend ses bras. Je baille aux corneilles. Je ne vais pas tarder à me coucher. Je vais dormir à poings fermés cette nuit. Quelle heure est-il ? Quelle journée épuisante ! Bientôt un repos mérité. Je dors debout. Je lutte contre le sommeil. Pardon, tu disais ? ouh là (soupirs). Et dire que je dois me lever tôt demain. Je suis en pilotage automatique. Une bonne nuit me fera du bien. C'est tout pour aujourd'hui !



mardi 3 février 2009

Exercice 2

My way to happiness is so questionnable.

Nous passions l'été en vélo, parcourant les petites routes communales au soleil, nous reposant à l'ombre des chênes et des châtaigniers. Deux mois de liberté, heureux de ne rien faire sinon profiter du temps et de nos amitiés. C'est bien simple, le monde n'existait pas. Nous vivions, tout simplement.

Bien des années plus tard, que tirer de ces souvenirs ensoleillés ? Suis-je heureux ? Assurément non. Et rien ne laisse à penser que je le deviendrai. Paris est une ville sombre, quand elle n'est pas laide.

lundi 2 février 2009

Exercice 1

Après une semaine de vacances dans les Alpes, l'occasion de revoir des amis suédois, le retour à Paris et ses mornes réalités s'avéra mouvementé. Dimanche, disputes de couple et questions existentielles. Lundi, retour au travail et ses lassitudes. Par une curieuse coïncidence, j'apprenais alors ma participation à une réunion en Suède la semaine suivante, qui devait se tenir à quelques 200 km de Stockholm. Les perspectives d'une aventure nordique de quelques jours m'inspiraient. Je me prenais à rêver du confort feutré d'un train parcourant les belles forêts enneigées du Dalarna.

lundi 19 janvier 2009

Les incertitudes du coeur

Il y a, dans toute interrogation sur la nature ou l'existence d'un sentiment amoureux dont on serait porteur, une culpabilité certaine, celle du doute. La mise en cause même ne consisterait-elle pas déjà en un désaveu ? L'état amoureux ne procèderait-il pas justement de l'absence de doute, et par conséquent toute interrogation n'en serait-elle pas un démenti ?
Par ailleurs, comment ne pas culpabiliser de ne pas aimer autant que le supposerait l'image que l'on peut avoir du sentiment amoureux, avec ce qu'elle comporte de manque et de nécessité ? Et dans ce cas, dans quel mesure peut-on et se sent-on obligé de le construire, s'il ne s'agit de le subir comme à son apparition apparition ?

dimanche 18 janvier 2009

Le déclin du Masque et la plume

D'une émission consacrée, servie il fut un temps par un Pierre Bouteiller exemplaire, Le masque et la plume est devenue un bien triste reflet d'elle-même. Citons NK, consommatrice de livres comme autant de divertissements sans fond tournées vers eux-même et protégeant de toute trace de réalité; AV, presque autant bavard qu'il est limité (toutes les qualités requises pour un poste dans un gouvernement d'ouverture); JCR, à peine conscient du rôle de pitre qui lui est dévolu ; PM, véritable étalon de la pensée plate et molle. Terminons par JG, qui commença bien mais dériva lentement vers une incroyable vulgarité précieuse (EN n'est pas loin), au point qu'il devient héroïque de supporter ses interventions partisanes et tout simplement sottes sans un trésaillement d'effroi. JLE, JML, les deux MC, au secours !

vendredi 16 janvier 2009

Une nuit de janvier

Nous marchions ensemble dans les rues fraîches d'hiver, illuminées d'enseignes et de mille fenêtres éclairées. A refaire le monde, son sens et ses raisons, de quelque bar en quelque restaurant, l'esprit vivifié par le froid de saison. Nul autre instant n'existait, et vivants, libres et fiers, dans nos manteaux de feutre et écharpes de laine, nous étions heureux.

jeudi 15 janvier 2009

Pour une indépendance de l'instruction

L'article 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen du 26 août 1789 ne souffre point contestation : "Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de constitution."

L'initiative pénale du ministère public était déjà sujette à critique, l'intérêt général de la société pouvant entrer en contradiction avec l'intérêt particulier de la chancellerie du moment. L'idée de confier la procédure d'instruction à un magistrat de parquet surpasse la simple désapprobation : elle n'a tout simplement pas la moindre légitimité au regard de la séparation des pouvoirs, donc de la Constitution.

Les parlementaires opposés à cette reforme seraient par conséquent bien inspirés de saisir le Conseil Constitutionnel, ce dernier ayant alors la tâche de décider si la proposition de contrôle par un juge de l'instruction est suffisante.

Malheureusement, à supposer que le conseil soit saisi, on peut se demander si l'analyse faite de la situation ne se contenterait pas d'une mise en situation de principe, dans laquelle l'Etat agit en son nom et de bonne foi. Une approche beaucoup plus pertinente consisterait à distinguer l'exécutif en tant qu'abstraction, ses prérogatives et ses missions d'une part, et d'autre part en tant que les personnes à ce poste, sujettes - certes - aux obligations qui leur incombent mais également à leurs intérêts propres. Si le contrôle par un juge de l'instruction peut paraître suffisant au regard de la première approche, somme toute très théorique, on ne peut que douter de son effacité dès lors que l'on adopte l'approche dualiste.

Quelques propositions : a minima, interdire toute instruction particulière de la chancellerie dans le cadre d'une procédure d'instruction ; ouvrir les possibilités d'initiative de procédure pénale à l'opposition ; et bien sûr confier l'instruction à des magistrats indépendants ...



lundi 12 janvier 2009

Epuisements

Périodes déphasées, ères troubles, je ne sais que penser de ces moments doubles, où saturé d'efforts et de mots d'un soir, me dois-je de garder idées claires et stylo noir.
Où cela mènera-t-il, nul ne le sait, au moins mériterai-je quelque repos d'été,
une fois le temps venu de la péccadille,
d'une nouvelle époque,
nuit couronnée.

jeudi 1 janvier 2009

La condescendance du si tu veux

En tête du palmarès 2008 des tics de langage de l'entreprise, le si tu veux l'emporte sans concurrence sérieuse. Il faut dire que cette expression multiplie les arguments en sa faveur.

Elle indique tout d'abord la connaissance que l'on a d'un sujet relativement complexe et la volonté charitable d'en simplifier les ressorts pour son interlocuteur. De façon plus ténue, on peut y lire une certaine implication de celui qui l'emploie dans l'action qu'il décrit, l'importance et le sérieux de cette dernière, et dès lors une démarcation soulignée entre ceux qui savent et les autres. Dès lors, le si tu veux relève du cadeau, expression des initiés qui daignent concéder une explication aux autres.

Il n'est donc pas rare de la voir employée dans les conversations sur les sujets les plus porteurs et revêtus de l'importance symbolique la plus élevée, à commencer par les personnes les moins susceptibles de discernement : nouveaux promus ayant à cœur d'embrasser le sérieux de ces activités jusque-là refusées, supérieurs en opportunité de signifier leur position hiérarchique à leurs troupes (certains n'étant alors pas dupes des mots qu'ils emploient), etc.

Le si tu veux s'inscrit également dans une forme de discours tenant de la fausse proximité. Relevant du langage familier, ayant clairement le sens d'une concession amicale, il relève tant du procédé de différenciation entre initiés et exclus que de la volonté amicale d'en atténuer les effets par une explication.

Il n'est donc pas étonnant de le voir se développer dans le contexte de l'entreprise, organisation hiérarchique où chacun aspire de façon contradictoire à des aspirations personnelles relevant de la distinction et à la volonté de nouer des rapports amicaux et humains avec ses collègues.

là où le si tu veux se rêve amical et explicatif, il ne peut se départir de son rôle de marqueur d'ignorance (du sens des mots et expressions que l'on emploie), de vanité (celle de celui qui sait), d'exclusion (ceux qui savent et les autres) et de condescendance (vis à vis de celui à qui il faut expliquer les vrais problèmes en simplifiant).