lundi 11 mai 2009

Nouvelles mythologies (I)

Je souhaiterais travailler sur un thème plus que jamais pertinent, celui de ce que l'on pourrait appeler la mythologie de l'Homme. J'entend par là une analyse des mécanismes sociaux qui tendent à mettre en avant une vision surévaluée voire héroïsée de l'homme contemporain. Celui-ci se trouve ainsi piégé par le reflet déformant qui lui est constamment offert. Le vivre ensemble cède la place à un vivre dans l'illusion de sa singularité, rêverie la plus communément partagée de nos jours. Car c'est bien là le paradoxe : l'obsession de la singularité conduit à un comportement des plus communs, construit pourtant sur le refus de la ressemblance.

Prenons pour commencer l'exemple d'un flacon de parfum. De nos jours, il ne s'agit plus de sentir bon pour soi et pour les autres, mais de sentir meilleur et différemment, de façon à signifier sa singularité ou plus simplement son existence. La publicité flatte depuis plusieurs années cette aspiration de la distinction, mais elle ne saurait à elle seule expliquer le succès de cete image du soi. Il faut croire que la mondialisation et plus particulièrement internet, en rapprochant les hommes, les a conduit à une meilleure appréciation de leur banalité. Qui suis-je, s'il est manifeste que plusieurs milliers de personnes ont à peu de choses près les mêmes goûts et aspirations que ce qui semblait me définir ?

Devant cette inquitétude identitaire, chacun cherche à se distinguer. Les prétentions disproportionnées des jeunes générations ne sont que le reflet de cette angoisse du moi. Il s'agit de se définir par ses aspirations, plus que jamais supérieures à celles des autres. Mais au lieu de conduire à un formidable mouvement de créativité et d'effort globalisé, le poids du commun s'est affaissé sur lui-même. Plus que jamais, on sauve le monde par procuration dans les séries télévisés plutôt que de s'atteler à un véritable et réel travail d'implication politique. Le fossé se creuse entre des aspirations titanesques et une réalité plate où chacun vit devant ses écrans son propre mythe.